(26,4) Avril 1989
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C'est bien d'une rencontre qu'il s'agit, car que savaient-ils du Cameroun, nos " envoyés spéciaux ", Alain CAVELIER le Français et Rose-Marie GAUDLITZ la Chilienne, avant d'en fouler le sol ? Ils en savaient ce qu'on en dit dans les livres de géographie, d'histoire, d'aventures et sur les dépliants touristiques... Avec ses 465 000 km2 et ses 10 000 000 d'habitants qui se doublent tous les 28 ans, confinant au Sahel au Nord, à l'équateur au Sud et compartimenté par des montagnes à l'Ouest et un réseau hydrographique dense partout, le Cameroun a la réputation d'être un " résume de l'Afrique " tant y sont variés les conditions climatiques, les types de végétation et le peuplement humain. Forêt dense et savane, plaine et montagne, mer et rivières y ont modelé les rapports de l'homme avec son environnement, à façonner l'Histoire. Depuis l'occupation des bords du Logone par les légendaires Sao jusqu'à la constitution de l'Etat camerounais moderne, le Cameroun a connu bien des avatars, passant par le Royaume du Mandara, la vassalité au Bornou musulman, la féodalité Foulbé, l'Empire Sokoto, les grandes migrations Fang du Sud, les chefferies Bamiléké et le Royaume de Bamoun, sans oublier la symbiose Pygmée avec la forêt. Les Européens sont apparus là en 1472 : Portugais d'abord, puis Hollandais. Ce fut le début de la traite des esclaves, supprimée par les Anglais en 1852. Puis une course de vitesse entre les Anglais, les Français et les Allemands tourna à l'avantage de ces derniers : la colonisation commençait. Poursuivie par les Français et les Anglais, elle ne s'acheva qu'à l'indépendance, le premier janvier 1960. Pays d'Histoire, donc, pays de mémoire collective dont témoigne, actuellement 'la vivacité d'un artisanat traditionnel remarquablement fécond et varié. Le FONDS MONDIAL y est présent. Par le financement d'un projet (et bientôt d'un second) dans le département de la Lékié, le FONDS MONDIAL a commencé une implantation dont tout augure qu'elle se développera fructueusement, parmi la population. La Lékié est un tout petit département jouxtant le Nord-Ouest de YAQUNDE, la capitale. Pays de collines au climat agréable en saisons sèches (décembre - février, juillet - août) mais aux pistes difficiles en saisons humides (le reste du temps), il présente une densité de population exceptionnelle au Cameroun jusqu'à 160 habitants par km2 dans certains arrondissements. Pays agricole : la quasi - totalité du territoire cultivable est occupée par le cacaoyer planté sous couvert forestier. Le cacaoyer, c'est une des cultures " de rente " dont l'expansion au Cameroun date de la colonisation, comme aussi celles du café, de la canne à sucre, du palmier à huile, de l'hévéa. Culture de rente : ça rapporte de l'argent quand les cours des bourses étrangères sont favorables, mais ça ne nourrit pas. Avec une taille de 1 à 3 ha, les exploitations ne permettent au mieux aux familles de subsister que pendant la saison de récolte du cacao, c'est-à-dire pendant trois mois. En fait les frais de scolarisation des enfants, d'habillement, de pétrole (les cases sont éclairées par des lampes-tempête), d'hygiène (le savon) et de santé absorbent la totalité de cette manne saisonnière. Et. il faut bien manger ! Si la culture du cacaoyer est réalisée par les hommes, la nourriture. de la famille, c'est l'affaire des femmes : ce sont elles qui cultivent le manioc, l'igname, le macabo, le bananier-plantain, l'arachide, l'ananas, la tomate, le haricot vert, les condiments. Ce sont elles qui pêchent les poissons et crevettes dans les rivières si celles-ci sont proches Ce sont elles qui cuisinent et s'occupent des enfants, qui vont puiser l'eau aux sources. Les protéines sont rares : peu de haricot sec, peu de soja ; de la viande une fois par semaine dans le meilleur des cas, une fois par mois en moyenne, jusqu'à une fois par trimestre ; du poisson parfois. En général un seul repas consistant est pris le soir... après une journée de travail ou d'école. Curieusement cette répartition des tâches a modelé au plan social une dualité comportementale assez étonnante : l'exiguïté des parcelles cacaoyères et la promesse financière que constitue la récolte détermine un comportement masculin très individualiste qui se traduit par des conflits de terre fréquents et souvent violents ; au contraire la difficulté de la subsistance quotidienne conduit les femmes à s'entraider à créer des groupes communautaires de culture et d'artisanat, des " tontines " de solidarité. Bien sûr, la dissociation décrite ici dans les fonctions sociales selon les sexes n'est pas absolue, mais elle se retrouve partout à des degrés divers. " Cependant, et c'est là qu'on peut parler de " rencontre ", Rose-Marie et Alain ont perçu tout au long de leur séjour chez leurs nombreux interlocuteurs et interlocutrices le même désir d'échapper à la dialectique misère - assistance et la même volonté de travailler pour prendre en charge le développement villageois. " Ce que l'on appelle au Cameroun les " initiatives locales de développement " fleurissent depuis 2 ou 3 ans et touchent les secteurs essentiels de l'activité des villages : production alimentaire, aménagements sociaux et sanitaires, scolarisation, entraide mutualiste (les tontines)... Des O.N.G. actives font de gros efforts pour l'information et la formation des agriculteurs, pêcheurs, éleveurs, artisans et animateurs ruraux. Certaines missions religieuses et même des organismes politiques liés à l'Etat apportent aussi leur concours. Mais la bonne volonté, ni même la compétence ne suffisent si les moyens initiaux de lancer la machine font défaut. Que de projets dans les têtes, que d'espoir dans les cœurs... et pas d'argent pour démarrer. Les sources qu'il faut capter et assainir, les écoles qu'il faut construire et meubler, les cases sociales et les dispensaires qu'il faut équiper, les transformateurs pour " descendre " l'électricité au village... tout cela pourrait être financé par des cultures, des plantations, des élevages, des ateliers communautaires qu'il faut mettre en place. A NKOLNTSA, à MBAMA, à NKOLZOA, à NKOLMEKI, à NKOM II, à EBOGO, à YANGAFOK, Rose-Marie et Alain ont vu tout cela, à DOUALA, à YAOUNDE, à SA'A ils ont rencontré des responsables d'O.N.G. et du gouvernement, des animateurs ruraux. Ils vous raconteront cela dans le prochain numéro de Monda Solidareco. |
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