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n° 73, page 1

Euro et Dollar : combat d'éléphants

Avec une remarquable facilité et quelquefois même de l'euphorie, près de 400 millions de personnes ont délaissé leurs monnaies nationales pour adopter la monnaie unique européenne. Le passage à l'euro est l'un de ces évènements qui marquent l'histoire non seulement de l'Europe, mais bien plus celle du monde entier. Si l'on considère le fait du point de vue du nombre de ses utilisateurs légaux, l'euro se place au 3ème rang, derrière le yuan chinois et la roupie indienne. Par ailleurs, sa masse monétaire le place au 2ème rang mondial, loin cependant derrière le dollar des Etats Unis. Et l'évènement d'importance mondiale est là : au-delà de quelques solidarités ponctuelles entre le dollar et l'euro - n'avons-nous pas vu la banque centrale européenne soutenir le dollar au lendemain du 11 septembre 2001 - vient de s'engager un combat d'usure, une concurrence qui pourra être féroce entre l'un pour conquérir, l'autre pour sauvegarder la première place dans l'économie mondiale.

Dans les années à venir la zone Euro va s'élargir à de nouveaux pays, dont l'Angleterre, et ainsi tous les anciens colonisateurs seront dans le même camp ! alors, mais déjà dès maintenant, la bataille se jouera dans les pays du Sud : l'Amérique latino-indienne et l'Asie du Sud-Est devront supporter le dollar, et l'Afrique supporter l'euro, et cette bataille sera rude.

Quelques Africains de la zone franc ont bien compris le danger : "L'Afrique n'a aucun avenir avec l'EURO..." "Le franc CFA n'appartient pas aux Africains. C'est une monnaie coloniale qui appartient à la France..." "Pourquoi, diable la démocratie en Afrique ? Avec l'EURO ça sera encore pire, car l'Europe va dévaluer cette monnaie que les Africains ne contrôlent absolument pas" (extraits de La Palabre d'Afrik.com).

Certains proposent même de créer une monnaie africaine ; mais les avoirs africains sont déjà confisqués par la Banque de France : 66 % des réserves de change de la zone franc sont obligatoirement déposés en France. Autrement dit, la zone franc est ligotée à son franc CFA et celui-ci va échapper au pouvoir de la Banque de France pour tomber sous les ordres réels de la Banque Centrale Européenne. Y a-t-il une instance démocratique qui contrôle cette banque, et qui pourrait infléchir ses décisions en fonction du bien-être des populations du Sud ? Non. La BCE a le devoir de faire réussir l'euro face au dollar, pas celui de panser les plaies du monde. Dans ce combat d'éléphants, Euro contre Dollar, c'est l'herbe qui va en pâtir nous dit un proverbe bantou.

Nous avons encore le souvenir de la dévaluation du franc CFA de 1994 : 50 % ! Les Etats africains ne s'en sont pas remis. Leurs dettes sont devenues encore plus lourdes, tandis que pour les habitants la vie est devenue encore plus difficile. Et d'autres dévaluations sont possibles. Malheur à ceux - les Etats comme les particuliers - qui mettront le doigt dans l'engrenage des prêts bancaires à rembourser dans la monnaie des géants.

Tout ceci n'est encore qu'un balbutiement, car on voit encore mal comment les choses vont tourner. Ce qui est certain, c'est que les membres du Fonds Mondial et tous les membres des autres groupes et organisations de solidarité doivent rester vigilants pour que les groupes ne perdent pas leur autosuffisance alimentaire là où elle a été si difficilement acquise par la réalisation de nos micro-projets.

Dans ce contexte, la solidarité n'est plus une question de choix mais une nécessité vitale.

Daniel Durand


	n° 73, page 1 Euro et Dollar : combat d'éléphants


	Avec une remarquable facilité et quelquefois même de l'euphorie, près de 400 millions de personnes ont délaissé leurs monnaies nationales pour adopter la monnaie unique européenne. Le passage à l'euro est l'un de ces évènements qui marquent l'histoire non seulement de l'Europe, mais bien plus celle du monde entier. Si l'on considère le fait du point de vue du nombre de ses utilisateurs légaux, l'euro se place au 3ème rang, derrière le yuan chinois et la roupie indienne. Par ailleurs, sa masse monétaire le place au 2ème rang mondial, loin cependant derrière le dollar des Etats Unis. Et l'évènement d'importance mondiale est là : au-delà de quelques solidarités ponctuelles entre le dollar et l'euro - n'avons-nous pas vu la banque centrale européenne soutenir le dollar au lendemain du 11 septembre 2001 - vient de s'engager un combat d'usure, une concurrence qui pourra être féroce entre l'un pour conquérir, l'autre pour sauvegarder la première place dans l'économie mondiale. Dans les années à venir la zone Euro va s'élargir à de nouveaux pays, dont l'Angleterre, et ainsi tous les anciens colonisateurs seront dans le même camp ! alors, mais déjà dès maintenant, la bataille se jouera dans les pays du Sud : l'Amérique latino-indienne et l'Asie du Sud-Est devront supporter le dollar, et l'Afrique supporter l'euro, et cette bataille sera rude. Quelques Africains de la zone franc ont bien compris le danger : "L'Afrique n'a aucun avenir avec l'EURO..." "Le franc CFA n'appartient pas aux Africains. C'est une monnaie coloniale qui appartient à la France..." "Pourquoi, diable la démocratie en Afrique ? Avec l'EURO ça sera encore pire, car l'Europe va dévaluer cette monnaie que les Africains ne contrôlent absolument pas" (extraits de La Palabre d'Afrik.com). Certains proposent même de créer une monnaie africaine ; mais les avoirs africains sont déjà confisqués par la Banque de France : 66 % des réserves de change de la zone franc sont obligatoirement déposés en France. Autrement dit, la zone franc est ligotée à son franc CFA et celui-ci va échapper au pouvoir de la Banque de France pour tomber sous les ordres réels de la Banque Centrale Européenne. Y a-t-il une instance démocratique qui contrôle cette banque, et qui pourrait infléchir ses décisions en fonction du bien-être des populations du Sud ? Non. La BCE a le devoir de faire réussir l'euro face au dollar, pas celui de panser les plaies du monde. *Dans ce combat d'éléphants, Euro contre Dollar, c'est l'herbe qui va en pâtir* nous dit un proverbe bantou.
	Nous avons encore le souvenir de la dévaluation du franc CFA de 1994 : 50 % ! Les Etats africains ne s'en sont pas remis. Leurs dettes sont devenues encore plus lourdes, tandis que pour les habitants la vie est devenue encore plus difficile. Et d'autres dévaluations sont possibles. Malheur à ceux - les Etats comme les particuliers - qui mettront le doigt dans l'engrenage des prêts bancaires à rembourser dans la monnaie des géants. Tout ceci n'est encore qu'un balbutiement, car on voit encore mal comment les choses vont tourner. Ce qui est certain, c'est que les membres du Fonds Mondial et tous les membres des autres groupes et organisations de solidarité doivent rester vigilants pour que les groupes ne perdent pas leur autosuffisance alimentaire là où elle a été si difficilement acquise par la réalisation de nos micro-projets. Dans ce contexte, la solidarité n'est plus une question de choix mais une nécessité vitale. Daniel Durand