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Nature, patrimoine mondial

Vers une Autorité Mondiale de l'Environnement

Réunion-débat organisée par le Comité Permanent Mondialiste,
le 2 décembre 1989 au Sénat.

Sous la présidence du recteur Robert Mallet

C'est d'abord à René Dumont que Robert Mallet donne la parole.

René DUMONT qui affirme que l'effet de serre constitue la plus grande menace que nous connaissions aujourd'hui. Il est dû aux grosses voitures et au gaspillage d'énergie ; il provoque les grandes sécheresses que nous connaissons depuis 1983 entraine la situation inhumaine de 114 millions d'enfants dans le tiers-monde. Il faut, dit-il, mettre en cause le " mythe de la bagnole ". " Dans 10 ans, dit-il, si nous continuons, les dés seront jetés.

" Aux droits de l'homme, il faut ajouter les devoirs, ces contraintes nécessaires à la survie de l'humanité ".

Puis, c'est Antoine WAECHTER, qui reconnaît que la crise écologique est évidemment à la dimension de la planète : la pollution transfrontalière suppose une démarche transfrontalière. Lui aussi dénonce les méfaits de l'automobile et constate qu'il faut régler les problèmes au niveau où ils se posent. Il faut réduire les disparités entre le Nord et le Sud, mais pour cela il faut effectuer une mutation dans nos pays industrialisés. Il nous faut inventer de nouveaux modèles de développements.

Il faut certes créer une Autorité mondiale qui réduira le phénomène de compétition et substituera une véritable conscience à des agents économiques entraînés par la mondialisation de l'économie qu'il dénonce.

Pour faire accepter une telle Autorité Mondiale (les Institutions Européennes rencontrent déjà des difficultés) il faudrait impliquer le public dans l'action de telles institutions et, dans le même temps, renforcer la compétence des institutions locales ou régionales.

Françoise PRADERIE, chef du département " Terre, Espace, Environnement " au Ministère de la Recherche, signale que des réalisations ont déjà été effectuées en matière de recherche au niveau mondial, tels l'Observatoire mondial de la planète, la Décennie des Risques, l'Observatoire du Sahara-Sahel, initiative réalisée grâce à Françoise Mitterrand.

Il est tentant de dire " à problème mondial, solution mondiale ", mais comment s'y prendre alors que les instances de coordination fonctionnent déjà difficilement, les pays se croient affectés différemment par les menaces, enfin les écarts Nord/sud constituent un problème énorme.

Les scientifiques sont des acteurs importants dans le processus de la mise en place d'une telle autorité, mais la réalisation est entre les mains des politiques qui détiennent la force de conviction, de contrainte et la recherche des ressources financières.

Robert MALLET cite Rocard et ses déclarations en faveur d'une autorité mondiale de l'environnement ;

La nature, dit-il, se moque de la souveraineté des États ; elle est souveraine. Elle n'a pas de patrice ; elle est la patrice de la vie !

Une Autorité mondiale doit s'attaquer aux causes de détérioration et non aux conséquences comme c'est le cas actuellement. Elle ne doit pas cesser d'avoir le sens des novations. Puis il donne la parole à Brice Lalonde.

Brice LALONDE constate l'incroyable accélération qui s'est produite dans l'histoire depuis 1972 en matière d'environnement.

Le voyage d'Apollo avait déjà marqué la prise de conscience planétaire, le rétrécissement de la planète, cette toute petite planète qu'il faut protéger. Nous sommes dans une ère nouvelle.

L'Appel de La Haye pour une Autorité Mondiale de l'Environnement face à l'urgence que constitue par exemple l'effet de serre, le prouve.

Cette Autorité devra harmoniser les mesures, organiser les études (géosphère, biosphère) et surtout( édicter et contrôler les normes.

Le problème qui se pose est celui de la disparité, l'Appel de la Haye doit être lié à l'équité, il est normal que les pays qui polluent le plus aident les pays qui polluent le moins, l'effet de serre est dû à notre excessive consommation d'énergie.

Brice Lalonde conclut : " je dois vous remercier. C'est grâce à vous, c'est grâce aux congrès que nos associations ont tenus en commun que la progression actuelle a pu avoir lieu. Elle est encore fragile ; nous avons encore besoin de vous ".

Puis, c'est le tour de Jerry BOURGEOIS qui rappelle le rôle du PNUE, se félicite de l'Appel de la Haye et suggère la création d'un Comité préparatoire provisoire pour constituer un Conseil Mondial de l'Environnement. Ce comité deviendrait ensuite une véritable Autorité mondiale moralement et légalement reconnue.

Ce Conseil mondial canaliserait les préoccupations et les aspirations des peuples en matière d'environnement. Il réunirait les personnes les plus représentatives, les plus compétentes.

Florence GALLIOT, consultante juridique auprès des organisations internationales, spécialement en matière d'environnement suggère, quant à la création d'une Autorité mondiale de l'environnement, d'étendre les compétences du Conseil mondial de sécurité en matières d'environnement, pour rester au sein des Nations Unies, de changer le statut du PNUE pour le transformer en institution spécialisée, en édictant une charte mondiale de l'environnement et une Charte constitutive plutôt que de créer de nouvelles structures de décision.

Jean AUDOUZE, astrophysicien, conseiller technologique dans le département " recherche, technologie, espace et environnement " à l'Élysée, relate ce que la France a accompli cette année en matière d'environnement, parle, lui aussi, de la couche d'ozone, de l'effet de serre, effet de serre indispensable, mais qui augmente de façon préoccupante ; il a doublé depuis 1930, en raison de l'irruption de l'industrialisation. La situation est alarmante.

En matière de problème mondial, raisonner en termes nationaux n'a aucun sens ! Il faut essayer d'unir les politiques de bonne volonté pour trouver une solution : le 11 Mars à La Haye 32 pays sur 180 ont pris des mesures supranationales.

Au Sommet des Sept, la moitié de la Déclaration économique est consacrée au problème qui nous rassemble aujourd'hui, un des points essentiels de ce texte est de rappeler le côté mondialiste de la protection de l'environnement, en particulier la difficulté qu'ont les pays du sud à accepter ces contraintes. Si on leur demande des efforts, il faut des compensations économiques. Il nous faut aussi, dans les pays industrialisés, réfléchir à des mesures fiscales qui décourageraient le gaspillage d'énergie.

La dernière mesure positive a été prise par la C.E.E. sous la présidence française, c'est la création d'une Agence Européenne de l'Environnement.

C'est ensuite Andrée GAYMARD ROLLET qui brosse un tableau très complet, qu'on ne peut résumer ici, des nouvelles énergies (énergies traditionnelles - bois et charbon - exploitées sur un mode nouveau, énergie produite par les plantes, énergies hydrauliques, hydrogène, vent gaz, énergie solaire, etc.) Une Autorité mondiale de l'environnement ne doit pas seulement être d'ordre technique, elle doit être fondée sur la solidarité planétaire.

Guy MARCHAND, lui, brosse un tableau de l'historique des travaux et propositions souvent précises qui ont été émis par les mondialistes depuis 40 ans. Depuis le projet Neptuno en 1955, en passant par la proposition d'une Autorité mondiale de l'environnement émise au nom du Congrès des Peuples par Josué de Castro en 1972 à Stockholm, et enfin, les différents congrès, colloques et séminaires, jusqu'à la réunion de ce jour.

Jean-Marc VAREZ, responsable du département " Conférences expositions " à la Fondation Cousteau, traite de la dégradation de l'environnement.

Il ne faut pas se contenter, dit-il, d'intégrer l'aspect global de l'environnement sans parler d'économie, de sociologie et de politique.

Il évoque surtout le problème de l'Antarctique qui, si existait une Haute Autorité de l'environnement, ne connaîtrait pas aujourd'hui les problèmes qu'il connaît. L'exploitation de l'Antarctique, zone internationale gérée par plus de 30 pays, voit apparaître la menace de' l'exploitation industrielle. La masse de pétitions (1.500.000 signatures) a conduit la France à se positionner différemment quand à l'industrialisation de l'Antarctique, soutenant aujourd'hui sans réserve l'initiative du commandant Cousteau.

Édouard BONNEFOUS évoque le problème des espaces verts et du thème de son prochain livre " Réconcilier l'homme et la nature ". Il reste profondément mondialiste car seul, dit-il, un effort mondial peut apporter des résultats.

Robert MALLET fait la synthèse de cette journée : d'abord tous les dangers qui ont été dénoncés, des propositions quant à une Autorité mondiale de l'environnement, de la proposition de Jerry Bourgeois quant à un Conseil mondial de l'environnement, ce qui a déjà été réalisé, l'Appel de La Haye qui fut un " choc ". Tous les orateurs ont conclu à la nécessité d'un organisme mondial supranational que certains ont défini. Cette instance devra comporter trois conditions : technique, et scientifique, conscience morale et le pouvoir. Il a ensuite constaté la confluence entre nos préoccupations et celles du commandant Cousteau pour conclure que la prise de conscience mondialiste se fait jour parce que nous sommes au bord du désastre, nous devons donc être raisonnablement optimistes, mais absolument vigilants.

Notes de séance prises
par Renée Marchand,
publiée dans le bulletin " Citoyens du Monde "
du Centre Français d'Enregistrement n° 86 (hiver 1989-1990)

 

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