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  INEGALITES : FATALITE ?

Sommaire du Fonds Mondial

Comme nous l'avons annoncé dans le numéro 11 de MONDA SOL IDARECO, nous entreprenons ici une étude sur les inégalités qui va nous mener du cas du paysan brésilien à l'organisation économique du monde et à la démarche du Fonds Mondial.

Cette étude se développera sur 4 numéros de MONDA SOLIDARECO. Aujourd'hui, nous décrirons la condition de l'homme et son pays. Dans les numéros suivants nous étudierons successivement :

  • l'organisation économique du monde et son histoire ;
  • les réponses du Fonds Mondial et ses objectifs ;
  • le mode d'action et les prestations du Fonds Mondial.

La description de la situation d'une certaine catégorie de paysans brésiliens, qui fera l'objet du texte ci-après, doit être considérée comme un exemple démonstratif

C'est en effet un cas très typé, à partir duquel il est aisé de remonter aux sources de l'injustice Et, bien que l'on ne puisse pas comparer la réalité de la vie d'un pêcheur thaïlandais, d'un éleveur Peul, d'un artisan malgache, etc., il se trouve que les mécanismes de l'injustice qui déterminent la faim, fonctionnent partout à partir du même principe, même s'ils ne s'extériorisent pas toujours sous la même forme. Les problèmes du paysan brésilien nous permettront d'expliciter ce principe de base.

Notons, depuis le récent changement de régime au Brésil, les choses semblent devoir se modifier dans ce pays où débute une réforme agraire. Cela n'ôte rien à la véracité de notre analyse.

1. PAYSANS AU BRESIL

Les petits agriculteurs brésiliens sont fréquemment expulsés de la terre qu'ils travaillaient en métayage. Avec leurs familles, dans des conditions très difficiles, ils se trouvent contraints de migrer vers les terres vierges du nord et de l'ouest du Brésil qui, peu habitées, appartiennent généralement à l'Etat. Ils s'y installent, défrichent et mettent en culture pour se nourrir. Ils cultivent des plantes vivrières : haricot, manioc... on les appelle les " poseiros. "

Souvent, lorsqu'ils ont mis en place un début d'infrastructure (chemins et route notamment, apparaissent de faux propriétaires, munis de faux papiers, qui cherchent à chasser les poseiros. Ces faux propriétaires sont riches et puissants. Ils commencent par user de l'intimidation, ils ont recours à des juges corrompus, et, si cela ne suffit pas, ils détruisent les villages et assassinent les hommes.

Les poseiros leur opposent la résistance passive, ou bien s'informent de leurs droits auprès des " avocats de la terre " ; en effet, la loi brésilienne prévoit que la terre appartient à celui qui l'a mise en valeur pendant plusieurs années. Face à la violence, ils demandent protection à la police. Mais celle-ci, mal équipée et souvent corrompue, est impuissante devant les bardes de " pistoleiros " bien armés qui sont payés par les usurpateurs.

Au bout du compte, il reste aux poseiros spoliés deux attitudes possibles :

  • pour le grand nombre, la fuite. Cette fuite les amène dans les " favellas ", les bidonvilles de grandes villes brésiliennes. Là ils rencontrent la misère et l'humiliation. Les hommes courent après des emplois souvent temporaires à peine rémunérés. Les femmes se prostituent, les enfants font de petits métiers pour survivre. Un enfant sur deux y meurt avant d'avoir 20 ans. Le chômage est roi. Il n'y a aucune protection sociale en cas de maladie ou d'accident.
  • d'autres choisissent la résistance collective, grâce à l'appui de syndicats professionnels, de communautés ecclésiastiques de base et d'un réseau de solidarités qui comprend entre autres des organisations non - gouvernementales et des groupes d'information et d'éducation. Ils cherchent là à mettre en place de nouveaux modèles de production où chacun ait du travail et où personne ne domine autrui.

Pourquoi cette situation ?

Il nous faut d'abord considérer ce qui se passe à l'échelle du pays.

Le poseiro est expulsé de sa terre à cause de la spéculation : la terre est au Brésil l'une des richesses qui ne se dévaluent pas (dans ce pays, l'inflation monétaire annuelle dépasse 200 %). La spéculation mise sur une triple exploitation du territoire brésilien en vue d'en tirer de grands bénéfices :

  • exploitation agricole tournée vers les cultures d'exportation :
    • cultures spéculatives dont le prix est fixé par les places boursières des pays riches, (café, cacao...)
    • aliments du bétail destinés aux pays riches (soja).
  • exploitation minière pour alimenter les industries des pays riches (fer, bauxite, or, argent, manganèse ...)
  • exploitation industrielle peu élaborée : premières transformations de minerais, unités d'assemblage sous licence, industries polluantes.

La plupart. de ces activités sont dites " de faible valeur ajoutée " ; elles rapportent peu en regard de l'investissement qu'elles exigent. Toutes sont tournées vers l'exportation.

Pourquoi le Brésil doit-il exporter ?

Pour rembourser sa gigantesque dette extérieure (cent milliards de dollars). La dette provient des emprunts contractés pour équiper le pays en vue de l'installation des compagnies multinationales des pays riches : routes, barrages, ports, distribution de l'énergie

De ce fait l'économie du Brésil est extravertie : ce pays, comme beaucoup d'autres du " Tiers-Monde ", a donné priorité aux productions d'exportation, alors qu'il ne peut même pas assurer l'alimentation de toute sa population. Pourtant le Brésil est extrêmement riche : il pourrait nourrir 400 millions d'habitants alors qu'il n'en compte aujourd'hui que 120 millions.

Pourquoi ces choix économiques ?

En fait le Brésil N'EST PAS MAITRE DE SES DECISIONS, pas plus que le poseiro ne l'est sur sa terre.

Là où est l'ARGENT est le POUVOIR DE DECISION, et l'on trouve l'un et l'autre :

  • dans les pays riches, sièges des places boursières et des compagnies multinationales,
  • dans les grandes banques internationales (dont la Banque dite mondiale, et notamment son instrument connu sous le nom de " Fonds Monétaire International) où les riches, là aussi, font la loi.

Nous examinerons dans le prochain article comment ces rapports de domination, sources des inégalités, fonctionnent, et qu'elle est leur origine historique.

AC

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