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volume I (1999-2002) Extraits de courriels |
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1723 - 1724 - Individu et communication - m
23/01/2001 à Dorothea Scheasby Je vais vous envoyer plusieurs messages pour répondre aux différentes correspondances que j'ai dernièrement reçues de vous. Ce premier message est écrit à titre tout à fait personnel ; il n'engage pas la responsabilité du Registre des Citoyens du Monde. Je veux parler de l'Assemblée des Citoyens du Monde qui s'est tenue à Taipei fin mars et début avril de cette année. Vous semblez avoir été très impressionnée par la réussite de Douglas dans cette Assemblée. Il est vrai qu'il s'est beaucoup dépensé pour le succès de cette Assemblée, il est vrai également que jamais jusqu'à présent une assemblée mondialiste n'avait connu un tel niveau de reconnaissance officielle ; il est vrai que la déclaration de paix de Taipei conseille à l'ONU d'écouter non seulement la voix des gouvernements mais aussi la voix des peuples à travers une assemblée démocratique des peuples. Douglas avait souhaité que je participe à cette réunion de Taipei. Au vu de ce qui précède, j'aurais certainement apprécié d'être présent. Cependant, outre les problèmes financiers et linguistiques qu'un tel voyage soulevait, je me suis permis cette analyse stratégique : La réussite de l'Assemblée de Taipei ne tient pas seulement à la qualité de Doug ou à l'efficacité de la branche Taïwannaise de AWC. Le financement de cette Assemblée et son haut niveau de représentation ont été possibles et permis en tant qu'élément d'un cadre stratégique beaucoup plus large. Je veux parler de la domination économique des Etats-Unis sur le monde. Cette domination économique des Etats-Unis s'est faite en 3 temps :
Reste un immense pays qui ne partage pas les mêmes valeurs démocratiques et libérales que les Etats Unis : la Chine. (L'ex URSS demeure une menace écologique pour la planète, notamment en raison des vieux stocks d'armes que les nouveaux États indépendants (Russie, Ukraine... ) n'arrivent pas à détruire ou neutraliser.) La Chine est une menace directe contre le Etats Unis ou son système. Une manière de la réduire à l'impuissance serait de mener contre elle une nouvelle guerre froide. L'effet attendu est de permettre le redéploiement de l'économie des Etats-Unis actuellement en perte de vitesse en raison du ralentissement de la croissance intérieure et de la perte de nombreux marchés notamment en raison de la zone Euro de l'Europe. Pour doper l'économie des Etats-Unis, il lui faut un stimulant très fort. La tension contre la Chine permettra effectivement d'obtenir du Congrès des crédits militaires, et donc de relancer l'industrie de l'armement. Et pour faire monter cette tension, le plus simple est d'énerver les Chinois sur la question de Taiwan. Il n'est donc pas innocent que des autorités de Taiwan sur les conseils des agences américaines (la CIA n'est pas la seule agence) aient accordé des facilités à une assemblée pacifiste, voire mondialiste. Comment la Chine pourrait-elle accepter la soumission à une institution démocratique mondiale ? Tandis que les autorités de Taipei et l'Assemblée des Citoyens du Monde plaidaient pour la paix, Pékin ne pouvait que se sentir visé inamicalement par cette plaidoire, et d'autres (américains), dans les coulisses, se servaient d'AWC - et se serviront d'autres manifestations pacifistes ou mondialistes - pour préparer une nouvelle ère de l'industrie d'armement. Je ne sais pas si mon analyse est juste. J'aimerais me tromper et ne considérer que le fait de l'Assemblée, de sa grandeur et de son message. J'aimerais que l'Assemblée n'ait été tenue que par des anges qui n'avaient qu'un seul objectif : la paix et le bien de l'humanité. Est-ce crédible ? Malheureusement, je suis persuadé que Douglas se fait actuellement manipuler ; et si j'avais été à sa place, j'aurais certainement agi de la même manière que lui : je me serais précipité dans la brêche ouverte pour parler du mondialisme.
24/07/2001 à Liliane Metz-Krencker Sommes-nous au bord d'une scission ? D'un certain sens elle est déjà consommée, puisque Doug, depuis 10 ans, édite ses propres cartes, considère ceux qu'il enregistre comme des membres d'une association (avec cotisation annuelle) et non comme des citoyens enregistrés à vie, ne nous communique pas la liste des enregistrés, et que ses papiers et son site Internet ne font aucune référence ni au Registre des Citoyens du Monde, ni au Congrès des Peuples. Il est vrai que le Congrès des Peuples est en panne. Le projet de Congrès des Peuples était né en 1963 à l'initiative de l'ensemble des organisations mondialistes connues de la planète (réunion à Bruxelles organisée par Maurice Cosyn), et là le Registre s'est naturellement vu confiée la responsabilité des listes électorales. Le Congrès des Peuples a correctement existé de 1969 à juin 1993, date du décès de Guy Marchand. Renée a voulu prendre la relève, mais seule, elle n'a pas pu faire le travail de deux personnes. Elle a organisé la 9ème et la 10ème élection. La dernière réunion du Congrès des Peuples date du 3 mars 1996, et je ne vois pas du tout comment il pourrait maintenant rebondir et faire le travail qui aurait dû être le sien. Et lorsque Doug a dit à Dorothea que Paris n'avait plus de projet, je pense qu'il parlait juste. On peut voir actuellement un certain éclatement du mondialisme, qui remplace la vision monolithique des fondateurs du Registre. Je crois que fondamentalement c'est une bonne chose, car la diffusion des idées prend nécessairement toutes sortes de chemins. Guy Marchand imaginait ce pluralisme comme postérieur à l'Assemblée Constituante Mondiale. C'est l'inverse qui se produit, c'est normal et c'est signe que la nécessité de doter le monde d'institutions mondiales démocratiques et supranationales, cette nécessité est assimilée par de multiples courants de pensée. Aujourd'hui le terrien qui veut exprimer son civisme mondial a le choix du mode d'expression : le simple enregistrement que nous proposons, la participation à une association comme le propose Doug, l'action contre la souveraineté des Etats comme le propose Garry Davis, et d'autres formes encore avec les fédéralistes, les écologistes, les membres d'Attac, les mouvements philosophiques ou spirituels. Je crois que le mondialisme, parce qu'il se diversifie, se prépare à vaincre l'égoïsme des nations, des Etats et des intérêts particuliers. Je n'y vois donc pas d'opposition, mais une complémentarité qu'il nous faut gérer avec intelligence. Cette diversification fait dire à certains citoyens du monde enregistrés que désormais cette méthode avait fait son temps. Je ne le crois pas. Tout d'abord, ceux qui tiennent ce discours sont des personnes qui ont posé un acte fort au moment de leur enregistrement, puis la conscience de leur citoyenneté mondiale les a poussés dans des formes d'action qui leur semblent maintenant incontournables. Il reste que le premier pas a bien été l'enregistrement, et que ce premier pas peut encore être proposé à beaucoup de personnes parce qu'il est hautement éducatif ; il est un modelage personnel de sa propre conscience. Si donc, certains sont passés à un deuxième degré, il n'en reste pas moins, que nous Registre devons rester à proposer le premier pas au plus grand nombre : l'inscription sur un registre commun à tous les citoyens du monde. Quant au projet mondialiste : on constate un accord de la plupart des organisations mondialistes sur la nécessité d'établir une deuxième chambre pour représenter démocratiquement les peuples face à l'Assemblée Générale de l'ONU qui continuera à représenter les Etats. La grande question est de savoir comment y parvenir : par opposition à l'ONU ? ou par collaboration avec l'ONU ? Au Registre, nous avons connu les deux aspects : Il a été créé en 1949 par opposition à l'ONU, puis dans les années 80, des collaborations ont été établies avec l'UNESCO et l'ONU. Là aussi ce sont deux voies qui en apparence peuvent être opposées, mais qui en fait sont complémentaires, car le monde ne se dotera pas d'une constitution en faisant table rase de ses acquits historiques. Je ne pense donc pas que le Registre ait à prendre position sur la méthode. Il est là pour éveiller au civisme mondial, enregistrer tous ceux qui pensent que cette démarche est utile, et finalement pour préparer les listes électorales mondiales. Il l'a fait pour le Congrès des Peuples. Si le Congrès des Peuples fait long feu, d'autres essais verront le jour, et le Registre pourra encore jouer son rôle.
21/10/2001 : à John De La Cruz L'aventure régionaliste des Citoyens du Monde et ce qui s'est passé autour de Guy ont laissé des plaies très profondes. Je connais la bonne foi des uns et des autres, les arguments mais aussi les maladresses des mêmes et de tous. Travaillant à construire la paix, je souffre et je me lamente qu'on ne puisse pas passer outre cette malheureuse période.
24/12/2001 : à Renée Marchand Le Fonds, j'y crois tant que nous oserons proclamer notre mondialisme. Actuellement, le plus visible est notre mutualisme transnational - ce qui demeure une grande nouveauté dans les rapports entre les peuples - et c'est bien ce à quoi appelait la déclaration mondiale n° 6 du Congrès des Peuples. Mais je conviens que c'est insuffisant si nous ne revendiquons plus des institutions mondiales démocratiques. A cause de Claude et d'Alain, j'ai laissé la charte pour une Instition Mondiale de Solidarité dormir, mais je la ressors depuis plus d'un an, et viens d'obtenir trois nouvelles signatures. Il savent aussi que si le Fonds abandonnait son but mondialiste, c'en serait fini du Fonds, car je démissionnerais aussitôt.
11/12/2001 au CA de SMF Je suis d'accord pour que l'on parle de la dette Le CADTM (gloire et louange à lui !) est né d'un discours de Jean-Paul II qui avait proposé que pour marquer le Jubilé de l'an 2000, les nations chrétiennes du nord annulent la dette du Tiers-Monde. Très petit succès de cette initiative. Si l'on parle du CADTM, je pense qu'il nous faut connaître - sans en faire état - cette origine "religieuse" afin de ne pas laisser cette prise aux anticléricaux qui sont quand même nombreux parmi nous. La dette du Tiers-Monde : il s'agit essentiellement de dettes contractées par les Etats, qui pour la rembourser - ou simplement payer les intérêts - y consacrent une part importante du budget - c'est à dire des prélèvements faits sur les Citoyens. Et là, l'articulation est délicate entre une faveur qui serait faite aux Etats - qui bien sûr pourraient ensuite se dépenser davantage au développement du pays - et les citoyens qui n'ont que leurs beaux yeux pour pleurer face aux grandes politiques financières. La proposition du CADTM de constitution "d'un fonds de développement démocratiquement contrôlés par les populations locales " rejoint bien entendu les propositions d'ATTAC, celle de la commission Faim et Développement des Citoyens du Monde, celle du Mouvement 1 % tiers-Monde, et donc bien sûr ressemblerait à notre démarche, mais en même temps, elle met le doit où ça fait mal : de quelle démocratie parlons-nous ? Qu'un fonds transnationalement constitué soit démocratiquement contrôlé suppose une démocratie à ce même niveau, et le contrôle par les populations locales suppose que cette démocratie transnationale soit de nature fédérale. Large débat. En conclusion, je suis d'accord pour une présentation du CADTM, mais à condition de présenter l'action de ce comité comme faisant partie d'un large débat sur la construction d'un monde plus démocratique.
Individu et communication Chaque individu a un potentiel immense, mais de fait limité par plusieurs facteurs que je classerai ici en " 3D ". Nous avons tous une somme de connaissances apprises et d'expériences acquises. C'est la première dimension, disons que c'est la hauteur, la dimension la plus souple tout au long de sa vie. Mais nous sommes tous limités dans notre largeur de vue, notre capacité et à la tolérance (ce que l'esprit ou le corps peuvent tolérer, supporter). C'est la deuxième dimension, fruit de son éducation et de la volonté permanente de travail sur soi-même. La troisième dimension, c'est la profondeur : sa manière d'être et de fonctionner, le rapport entre objectivité et subjectivité, la capacité d'analyse. Cette dimension, propre à chacun, est très peu malléable. Dans la communication, il faut non seulement que les points de vue soient compatibles, mais aussi il faut que les cadres soient ou bien compatibles ou bien qu'ils soient complémentaires. L'un des problèmes est que les cadres de connexion sont fragiles, et si quelque chose est cassé, plus rien ne passe. Cela, c'est sur le plan personnel. Sur le plan collectif, je ne m'attarderai pas : Ou bien le terrain est favorable, ou bien il est fracturé. Dans nos rapports, nous avons des appréciations de personne à personne. Je prends le terme " appréciation ", variable en fonction des circonstances, plutôt que le terme " jugement " qui est trop définitif. Chacun voit l'autre dans une partie de son potentiel : Quelles sont ses connaissances ? Quelle est son ouverture ? Comment " travailler ", " fonctionner " avec lui, c'est-à-dire avoir des relations positives tout en respectant ce qu'il est au fond de lui-même ? |
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